La présente page représente la correspondance de 4 frères mobilisés aux 1er escadron du 20e GRCA, au 14e BCA et au 31e RAD. Ils présentent chacun leur tour les conditions de vie notamment au cours de la drôle de guerre notant parfois de façon détournée le lieu où se trouve leur régiment pour contourner la censure militaire. Un des trois frères, Noël, s'illustrera en Norvège avec son bataillon et sera même nommé pour diriger le bataillon après son retour de Norvège entre l'Afrique du Nord et la France, suite au départ de plusieurs cadres vers les Français Libres de de Gaulle.
27 aout 1939
Lyon Perrache
Mes chers parents,
Je ne pensais pas être rappelé si tôt. A 15 heures hier, les numéros 5 et 6 ont été affichés, je suis 5. J'ai fais l'impossible pour rassembler toutes mes affaires, mais je n'ai pu expédier ma caisse de livres. J"ai écris à un camionneur de Montbéliard pour faire l'expédition en petite vitesse pot dû au clos. J'ai prévenu en outre par écrit Mme Cotenceau gérante du cercle.
J'espère trouver aux bagages malle d'osier et cantines. Je garde cantine et expédie en gare de Voiron, grande vitesse malle d'osier et ma valise. Je vais joindre tout à l'heure les papiers pour retirer vélo et bagages (malle et valise) à Voiron.
Je rejoins de suite avenue Berthelot, il est 8h15.
J'en eu un mal horrible pour faire rentrer toutes mes affaires et encore bien plus de mal pour trouver un taxi pour les porter à la gare de Montbéliard.
Il ne me manque plus que le [xxx] et quelques trucs de détail tel que le blaireau. Je vous ferai connaitre dès que possible ma résidence.
Je ne sais si Edmond a été rappelé, son papier rouge est un cas particulier, je vais peut être le trouver au centre. A part ça, tout va bien.
Je vous embrasse bien tendrement mes chers parents et bonjour amical à tous Mme [xxx] compris.
D'après les journaux rien n'est encore au pire.
Le 31 aout 1939
Ma très chère maman,
J'ai reçu le 30 ta bonne lettre du 28 aout. J'ai fait avant hier une grande tournée de 350 km en auto avec notre commandant.
Je suis en très bonne santé et j'espère comme tu le dis que les choses trainant en longueur, il y aura finalement un arrangement.
Mais j'ai une confiance absolu que notre mère du ciel nous protègera tous en toute circonstance. j'ai toujours la médaille que tu m'as donnée; elle est dans mon porte monnaie avec la médaille de Notre Dame de Lourde que l'oncle Andrée nous avait donnée à son retour de pèlerinage.
Je suis content des nouvelles que je reçois de Papy et de notre bébé.
Tu dois être seule avec Andrée, Henri, Georges, maintenant car la maison a dû se vider et la Murette doit être terriblement calme.
Je t'embrasse bien affectueusement ainsi que tous les frères et Andrée.
Ton Fils
Noël
Le 12 septembre 1939
Ma bien chère maman,
Je t'écris à la hâte ce petit mot que je remet à une personne qui doit passer par la Murette, car je sais que les lettres n'arrivent pas et depuis le 2 septembre je n'ai plus rien reçu.
Je vais très bien et nous pensons rester encore quelques temps ici.
As tu des nouvelles des frères. Il faut m'écrire Lieutenant Gillet 14e BCA CA secteur postal 247.
JE n'ai rien reçu de Papy depuis le 2 et bien que non inquiet je voudrais bien avoir des nouvelles.
Il ne faut pas perdre courage surtout. La Saint Vierge ne nous abandonnera pas. Soignez vous bien. Je voudrais que papa te rejoigne au plus tôt.
Je vous embrasse tous bien fort.
ton ainé qui t'aime bien,
Noël.
Le 6 septembre 1939
Ma chère maman,
Je me trouve pour quelques jours encore à la commission de répartition des chevaux, où nous affection aux différentes unités en les identifiant et en les immatriculant environ 400 chevaux par jour. Lorsque ce travail sera terminé je ne sais encore où j'irai.
René est toujours à l'habillement. Je le vois parfois le soir.
Avez vous des nouvelles de Noël et d'Albert?
Je plains beaucoup Simone. Mais il ne faut pas qu'elle perde courage. J'ai l'impression que la guerre, puisque guerre il y a, sera courte. Devant de la Résistance, le peuple allemand devrait se révolter. Comment va la petite Noëlle ?
Sans doute, la région de la Murette n'a pas été évacuée et c'est encore un lieu relativement sur, si vous prenez les précautions nécessaires contre les bombardements aériens, car, la maison située près du clocher est très vulnérable.
Les deux Bélard ont rejoint Chambéry. Je connais ici d'assez nombreux camarades qui sont affectés en général au 114e RAL. Rigot est avec moi. Il s'est marié la veille de la mobilisation. Son mariage s'est fait dans la plus stricte intimité et ne voulant pas se mettre en habit, je lui ai prêté pour la circonstance ma tenue de [ ...] qui lui allait comme un gant. Il a eu 24 heures de permission.
Les usines tournent telles ? Papa reste t il à la Murette ? Georges et Henri seront d'un bon soutien pour vous j'en suis certain. Il faut qu'ils gardent un moral excellent qui est d'ailleurs le nôtre à tous. Nous irons au combat sans joie, mais avec la volonté et la certitude de remplir notre mission.
Lorsque l'on réfléchit aux évènements, il semble que l'Histoire n'a pas connu d'époque plus triste, et où la folie humaine n'ai atteint un pareil degré de malfaisance . Mais lorsqu'un fou plonge les autres dans la douleur et la misère, le meilleur moyen de revenir à un état normal est de la supprimer.
Je vous embrasse tous,
Edmond
29 octobre 1939
Secteur postal 168
Ma chère maman,
Voilà assez longtemps que je ne t'ai pas écrit, c'était uniquement parce que nous avons changé d'emplacement mais nous sommes toujours dans la même région. je pense que tu as reçu la carte que je t'ai envoyée. Nous sommes maintenant installés à cet endroit et je pense que ce sera pour un bon moment.
J'ai reçu l'autre jour la lettre d'Andrée et elle m'a fait le plus grand plaisir. J'espère qu'Edmond et René sont toujours dans le Massif Central. Ici il ne fait pas chaud , il tombe de la neige, heureusement nous sommes très bien installés et je ne manque de rien pour le moment. Dis à papa que j'ai reçu ma culotte et que je le remercie beaucoup. Au revoir ma chère maman, je t'embrasse bien tendrement
A. Gillet.
Le 25 décembre 1939
Mon cher papa,
J'aurai voulu t'écrire plus tôt mais j'ai été pas mal occupé ces derniers jours à accompagner des convois de permissionnaires, et je profite de cette journée de liberté pour t'envoyer mes meilleurs souhaits de fête. C'est la première fois que je ne suis pas avec vous pour Noël, et je regrette beaucoup de n'avoir pu prendre ma permission plus tôt pur passer les fêtes en famille. Nous avons avoir cependant une messe de minuit et nous nous sommes tous réunis aujourd'hui pour faire un bon déjeuner et pour passer la journée ensemble. Mais malgré tout, ce fut un Noël bien triste en songeant aux Noëls d'autrefois.
J'espère que tu es maintenant rétabli et que le rhume dont maman me parlait dans sa dernière lettre est maintenant quéri. J'espère aussi que l'oncle André va mieux et que la vente de l'oncle l'Abbé a eu un bon résultat. Pour nous rien de nouvea, je me porte toujours très bien, nous sommes toujours au même endroit, et il ne fait pas très froid pour le moment.
Au revoir mon cher Papa, c'est en te renouvelant mes souhaits de fête et en espérérant te voir bientôt (je pars en perm le 9 janvier toujours) que je t'embrasse bien tendrement.
Sous lieutenant Gillet 20e GRCA
Le 25 janvier 1940
Mes chers parents,
Voilà déjà 4 jours que je vous ai quitté, et je n'ai pu trouver un moment pour vous écrire. J'ai fait bon voyage. Mais alors qu'il faisait soleil à la Murette, la neige tombait en mauvaises rafales à partir de Lyon. Je suis arrivé le 22 suivant l'itinéraire prévu. Par un heureux hasard j'ai trouvé une voiture au groupe qui m'a permis de rattraper la colonne de la batterie qui était en mouvement sous la neige.
Il a fallu de suite faire installer gens et chevaux, sous le coup d'une inspection, dans un petit village un peu plus au sud. Depuis hier, il fait soleil et la neige est moins gênante. Pour l'instant, nous gardons la même adresse.
Nous ne sommes pas trop mal logés. Edmond tient un rhume de poitrine. Ce matin,il se sentait courbaturé sur la poitrine. Le docteur l'a vu et a déclaré que c'est la fin d'un rhume. Il a ordonné des ventouses, et dit que cela ne doit pas durer. Il a pu garder le lit et ses propriétaires le soignent au mieux. Pour moi, le rhume a disparu.
Nous avons reçu ce matin, la lettre de maman, et nous sommes heureux que l'état de papa ne soit pas aggravé. J'espère que pour l'abcès tout va bien et que ce n'est pas trop douloureux. Prenez toujours des précautions en vous habillant bien pour sortir. Je crois que si Edmond avait porté ses 2 pulls il n'aurait pas rechuté.
Cette permission m'a fait grand bien, et le souvenir, chose à cultiver, me permet d'en ruminer les bons moments. J'espère recevoir bientôt des nouvelles d'Albert, Noël et de tous.
Je vous embrasse bien tendrement mes chers parents,ainsi qu'Andrée, Bonzo et Gimb.
Sous lieutenant Gillet.
Le 29 avril 1940
Mon cher René, Mon cher Edmond,
J'ai reçu avec grand joie des nouvelles de René par sa bonne lettre du 24 mars. J'ai confiance que la Sainte Vierge qui a jusqu'ici veillé sur nous tous continuera à nous accorder son inviolable protection.
Ici, rien de nouveau, si ce n'est que nous changeons encore de code postal. Nous prenons le n° 204. Je pensais pouvoir partir en permission autour du 5 avril.
Malheureusement les circonstances veulent que ce soit repoussé à une date ultérieure.
Soyez tous les deux de la plus grande prudence. Il vaut mieux ne pas craindre la fatigue, la très dure fatigue que commettra la plus petite imprudence.
J'espère que votre séjour en ligne cessera bientôt et que le tour de la relève approche.
Simone et Donzon vont bien pour le moment, bien que Donzon soit encore sujette à des petites crises de diarrhées.
Je vous embrasse tous les deux bien affectueusement et avec confiance dans la protection d'En Haut je vous dis à bientôt.
Noël.
Le 22 avril 1940
Mon cher Henri,
J'ai lu avec plaisir ta bonne petite lettre et je suis heureux que tout aille bien à la Murette. Mais je suis inquiet au sujet de Noël. Sait on sa destination ? ces sales boches mettront bientôt le feu à toute l'Europe. Malgré tout, il faut avoir bon espoir et prier pour ceux qui sont engagés.
Les communiqués à partir du 13 avril parlent d'action qui se passent sous nos yeux. Les boches sont beaucoup plus agressifs et font usage de leurs obus. Mais en somme, il y a eu assez peu de mal et c'est une chance.
Ils ont marmité avec rage quelques coins et tenté des coups de main, toujours à l'aube, au moment où la fatigue gagne les guetteurs et les fantassins. Mais nous leur répondons rigoureusement et plusieurs fois en moins de 3 minutes, 200 obus leus sont tombé sur le nez. Douche chaude des plus calmantes.
Comme les journaux l'ont dit, un boche avait placé une pancarte piège devant nous " Chemin interdit aux chiens d'anglais et de Français et réservé aux Allemands". Il a été étendu par un anglais dans la nuit même.
Mais il y a tout de même des moments de calme et les beaux jours commencent à rendre le boulot moins pénible. Quelques fleurs sont apparues et en voici quelques unes qui viennent de mon observatoire. Les coucous n'interrompent pas leur chant même sous le baroum.
Il doit y avoir de beaux jours à la Murette et il faut faire quelques ballades pour gouter là bas une saison que tu ne connais pas encore et dont tu garderas une excellente impression.
Edmond doit être rentré, mais je n'ai pas eu de ses nouvelles. Je crois que la DAC est toujours au même endroit et nous, nous n'avons pas bougé encore. Les permissions de détente ne sont pas rétablies. Il fera plus chaud quand je pourrai partir. J'espère qu'Albert est toujours au même endroit. J'ai bien reçu la dernière lettre de papa.
Je t'embrasse bien affectueusement mon cher Henri ainsi que papa, maman et tous.
Sous lieutenant Gillet
EM 1er groupe 31e RAD
SP 36
Le 4 mai 1940
Mes chers parents,
Nous partons demain soir, pour le premier d'où nous sommes partis , puis après nous embarquons pour une destination quelconque.
Rien de nouveau ces derniers temps. Il pleut tous les jours. Nous allons bien.
Je n'ai pas revu René depuis l'autre jour. Je pense qu'il va bien et que son séjour en ligne est terminé.
Espérons qu'il n'arrivera rien à Noël en Norvège et qu'il pourra s'en tirer.
Je ne vois pas pour que lieu Albert pourrait partir. Je ne me rappelle pas la destination dont il avait parlé en permission.
Je pense que vous allez tous bien et qu'on pourra, peut être, trouver un gareur.
Avez vous des nouvelles de Pierre ?
Je vous embrasse tous très affectueusement.
Edmond.
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